Avril 1994. Le Rwanda baigne dans le sang. On y commet des actes d’une violence inouïe. En quelques semaines, les cadavres de centaines de milliers de victimes, hommes, femmes et enfants, s’entassent dans des charniers hallucinants.
Afin de comprendre la nature et les causes de cette violence insensée, la journaliste Dominique Payette s’est rendue sur place l’année suivante. Elle s’est aperçue que la réalité qu’elle avait sous les yeux ne correspondait pas à ce qu’elle s’imaginait trouver.
Contrairement à ce que l’on peut croire, la société rwandaise n’est pas à proprement parler composée de différents groupes ethniques. La population de ce pays partage la même langue, les mêmes traditions, la même religion. Pourtant, une supposée ethnicité rwandaise diviserait ce pays en trois groupes: Hutus, Tutsis et Twas. Il s’agit en réalité d’un modèle social construit de toutes pièces, hérité des fantasmes soi-disant scientifiques de la raciologie du XIXe siècle.
Ce racisme primaire subsiste de nos jours, notamment par le manque d’actualité et de subtilité des définitions juridiques internationales du concept de génocide. En effet, celles-ci sont encore empêtrées dans ces notions archaïques qui cristallisent davantage le modèle ethnique rwandais.
D’ailleurs, les victimes du génocide elles-mêmes, du moins les rescapés vivant parmi nous, au Québec, voient aujourd’hui l’ethnicité hutue ou tutsie du Rwanda comme un «marquage» incontournable de leur identité personnelle. Est-il trop tard pour espérer une cohabitation harmonieuse ? Cette dernière est-elle possible ? Ces rescapés nous disent qu’ils ne peuvent pas tourner la page à n’importe quelle condition.